mercredi 26 août 2009

Réalité

Je suis allongé sur ce grand lit. Ma chambre aux murs immaculés a comme instauré le règne d'un silence de roi. Seuls les arbres du bois, comme des grands seigneurs qui chuchotent au loin, bruissent gravement de leurs centaines de feuilles. Je suis sur le dos, les yeux ouverts en direction du plafond blanc. Le plafonnier qui y est suspendu pointe vers moi un oeil d'une incandescence menaçante, portant à sa droite une ombre longue et etirée. Dehors, la nuit coule sur le ciel et la recouvre peu à peu d'une matière fluide et étoilée. Je ferme les yeux. L'empreinte de l'ampoule se fixe sous mes paupières et clignote d'un bleu fluorescent. Je pose alors les paumes de ma main sur mes paupières et les presse très légèrement. Sur les bords de l'écran noir apparaissent des filaments frétillants de couleur mauve qui s'étendent bientôt vers le centre, donnant naissance à leurs frères roses, verts et bleus et s'entremêlant avec eux de manière éléctrique. Un anneau orange perce le centre et s'étend vers les extremités, laissant entrevoir à l'intérieur de son cercle des motifs blancs et noirs éclairés par une faible lumière violette. Ces motifs tournent sur eux-mêmes, je suis comme attiré vers eux, m'en rapproche doucement, porté par une pesanteur inconnue. Puis tout s'éclaire. Le mystère délie ses lèvres des miennes. Les motifs sont ceux du carrelage d'une très grande église. Il n'y a ni bancs ni autel. Seul le silence, encore lui, émane de l'édifice et résonne contre ses parois. Les motifs complexes du sol se mettent soudainement à tourner très vite, l'obscurité s'installe et m'éloigne d'eux, pour me replonger dans le noir complet. J'enlève mes mains de mon visage et réouvre mes yeux piquants. Le plafond blanc se jette à ma vue, vexé d'avoir été ignoré pendant de longues minutes. Je fais cette sorte de rêve eveillé depuis tout petit, ou l'existence s'étire autour de mois, puis m'écrase, et où le temps parait suspendu, laissant le mystère me noyer dans ses entrailles noueuses et recouvrir mes yeux d'une épaisse poussière aveuglante. J'étire mes longs bras et décide de me lever du lit. On m'appelle dans le couloir, j'entend mon nom. Je me dirige vers la porte et l'ouvre. Elle me gifle. Violemment, par suprise. Après m'avoir arraché cette couche de poussière qui m'empêche de parler et écarté mes yeux, elle me tend les bras et m'entoure, posant sa tête sur mon épaule. Sublime, elle se détache puis, lumineuse comme un soleil, celle qu'on nomme la Réalité se rapproche de moi, m'éblouit, et, solennelle, m'orne la tête d'une couronne dorée : Je suis l'Empereur de ma propre vie.

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